Une rentrée 2020 décisive pour l’avenir de l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne

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Cette rentrée 2020 va être décisive pour l’avenir de l’Université Jean Monnet et plus généralement pour l’avenir de l’enseignement supérieur et de la recherche à Saint-Étienne.

Le Collectif UJM, créé le 26 juin dernier, demande la conservation de la personnalité morale et juridique de l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, afin de porter collectivement un projet académique ambitieux, avec l’ensemble des partenaires lyonnais et stéphanois.

Le « collectif UJM » a adressé le 2 septembre une lettre ouverte au premier ministre Jean Castex afin d’expliquer la situation de crise inédite que traverse l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne.

Voici l’intégralité de cette lettre ouverte:

Au nom du droit à la différenciation territoriale, l’Université de Saint-Étienne ne peut pas disparaître

« Lors de votre discours de politique générale du 15 juillet 2020, vous avez érigé le droit à la différenciation territoriale comme ligne forte de la seconde partie du mandat du Président de la République. Vouloir ressouder le pays en libérant les énergies locales, faire le choix du pragmatisme plutôt que celui d’une uniformité des réponses de l’Etat pourraient marquer une rupture profonde de méthode et d’orientation politique. Vous devriez trouver dans la situation de crise inédite que traverse l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne et par ricochet le processus de création d’une Université de rang mondial (au sens du classement de Shanghai) sur le site Lyon St-Étienne, un cas d’école, un terrain d’expérience naturelle. Il s’agira ni plus ni moins d’affirmer que la priorité nationale, portée par les Initiatives d’Excellence (IDEX), de faire émerger des ensembles universitaires plus forts et plus visibles sur la scène internationale ne nécessite pas nécessairement la disparition d’une Université de 20 000 étudiants, ancrée sur un territoire d’1 million d’habitants et dont les réussites tant scientifiques que d’insertion professionnelle des étudiants sont incontestables.

 

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Mise en place en 2011, la politique IDEX vise à accélérer la reconnaissance internationale de quelques ensembles académiques par l’octroi de financements conséquents et complémentaires aux dotations récurrentes de l’État. Évalués par un jury international, les sites IDEX confirmés ou en voie de l’être ont tous été tenus de penser une nouvelle gouvernance dotée d’un niveau d’intégration fort entre les établissements concernés. Derrière cette condition, il s’agit de garantir que les moyens IDEX viennent bien irriguer une stratégie académique commune.

Depuis presque 10 ans, le site de Lyon Saint-Étienne, fort d’un potentiel académique exceptionnel, est ainsi engagé dans une course à l’obtention d’une labellisation IDEX. Cette course longue distance au parcours chaotique, entamée à 12 Établissements dont 8 sont désormais au bord de la route, entre dans une phase décisive, celle du vote à l’automne des statuts d’une nouvelle Université (dite « Université Cible »), résultat de la fusion des Universités Jean Monnet de Saint-Étienne, Claude Bernard Lyon 1 et Jean Moulin Lyon 3 et de l’intégration de l’École Normale Supérieure de Lyon, cette dernière étant la seule à garder sa personnalité morale et juridique.

Opposée à ce projet de fusion et de statuts de l’Université Cible, la quasi-totalité de l’équipe présidentielle de l’Université de Saint-Étienne a démissionné de ses fonctions le 26 juin dernier, concomitamment à la création d’un collectif.

Ce collectif comporte aujourd’hui un peu plus de 360 membres. Beaucoup sont de véritables acteurs et actrices de l’IDEX à Saint-Étienne, les artisans de la politique d’ouverture vis-à-vis de l’enseignement supérieur et la recherche lyonnais, tous convaincus que l’avenir de l’Université Jean Monnet s’inscrit dans le cadre métropolitain Lyon Saint-Étienne. Mais pas à n’importe quel prix ! Et certainement pas dans le cadre de statuts prévoyant l’absorption puis la dilution de l’Université de Saint-Étienne dans un ensemble universitaire barycentré à 50 kilomètres. Encore moins pour un projet qui n’offre aucune garantie de moyens et d’autonomie décisionnelle pour le site stéphanois.

En clair, sur l’autel de l’IDEX, la communauté universitaire stéphanoise devrait sacrifier son identité profonde. Cet établissement s’est construit grâce à une volonté tenace d’installer une université autonome dans un territoire ne présentant pas, à sa création, toutes les prédispositions naturelles pour cela. C’est grâce à cette autonomie qu’il a su trouver une cohésion, un équilibre entre sa mission de formation auprès d’une population étudiante parfois en grande difficulté et une politique d’excellence récompensée par des réussites à de nombreux Programmes d’Investissement d’Avenir, par des start-up reconnues internationalement ou par l’offre de 6 Masters Européens labellisés ERASMUS MUNDUS. Il faudrait également se séparer de ce qui est sans doute le plus précieux : la pluridisciplinarité de l’établissement, promise à un éclatement dans huit pôles de formation et de recherche concentrés à Lyon, pensés comme des silos quasiment autonomes alors que les enjeux sociétaux et scientifiques actuels n’ont jamais autant réclamé la culture de la transversalité que les enseignant·es et les chercheur·ses stéphanois·es pratiquent quotidiennement. 

Appel au maintien de la personnalité morale et juridique de l’Université de Saint-Étienne

Une perte de personnalité morale et juridique est un acte politique lourd pour une Université. Elle devrait être nécessairement contrebalancée par un horizon et des garanties de développement aujourd’hui inexistantes, et dont dépend étroitement la dynamique du territoire où elle se situe. La métropole de Saint-Étienne, les départements de la Loire et de la Haute-Loire ainsi qu’un très grand nombre de représentants du monde socio-économique en ont d’ailleurs conscience en apportant un soutien sans faille au maintien de la personnalité morale et juridique de l’Université de Saint-Étienne.

Malgré son ampleur et les répercussions en interne à l’Université, la secousse stéphanoise n’a pas pour l’instant suscité de réactions officielles de compréhension et d’ouverture à la discussion. Le message fataliste de la Présidente de l’Université, qu’il n’y aurait pas d’alternative et qu’en refusant de se soumettre nous condamnerions notre établissement, démontre à quel point des institutions publiques pourtant essentielles à la vie du pays peuvent être entraînées dans des dérives de gouvernance inacceptables. Monsieur le Premier Ministre, c’est le dogme de la fusion à tout prix, parfois d’ailleurs au détriment d’une réelle construction académique, qui a jusqu’à présent caractérisé ce projet de nouvelle Université. Il est encore temps que l’État intervienne pour aider à déployer sur le site Lyon Saint-Étienne le meilleur dispositif compatible avec le maintien de la personnalité morale et juridique de notre établissement. Il en va du respect d’un particularisme territorial qui n’est en aucune façon un repli sur soi, mais bien la condition d’adhésion et de réussite d’un projet à forte ambition académique« .

Un peu d’histoire

Luniversité Jean-Monnet-Saint-Étienne, officiellement créée le , est l’établissement pilote de l’enseignement supérieur stéphanois, réuni au sein du pôle universitaire de Saint-Étienne (qui compte une dizaine d’établissements). Cinq ans plus tard, 5 000 étudiants de Saint-Étienne et des départements limitrophes y sont déjà accueillis.

L’Université de Saint-Étienne prend le nom de Jean Monnet en 1989, illustrant son ambition ouvertement affirmée de compter, en Europe et dans le monde. Au début des années 2000, elle une connaît une modernisation profonde avec le développement de la valorisation de la recherche, confirmant sa place d’Université pionnière puisqu’elle est l’une des cinq premières françaises à le mettre en place.

Depuis 2007, elle est membre du Pôle de Recherche et d’Enseignement Supérieur (PRES), puis de la Communauté d’universités et d’établissements () « Université de Lyon » qui regroupe 20 établissements des universités de Lyon et Saint-Étienne. En février 2017 elle obtient la labellisation IDEX dans le cadre du site Lyon Saint-Étienne.

Trouvez les éléments historiques de l’ESR Lyon – Saint-Étienne pour la période 1995 – 2020 ICI

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