Gaël Perdriau : « La sécurité, nouvelle inégalité territoriale »
Pour donner son point de vue sur rôle des élus locaux face aux nombreux défis sur le plan sécuritaire à travers la France et après la crise du Covid-19, Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne mais aussi vice-président LR (Les Républicains), a publié, le 29 juillet, une tribune sur le site d’information Atlantico.
Tribune de Gaël Perdriau :
« Si la pandémie, dont nous subissons toujours les conséquences, a conduit à une prise de conscience salutaire sur la fragilité même de notre société, le déconfinement a démontré, en revanche, les limites de cet éveil. Les fractures profondes de notre société ont éclaté au grand jour de manière crue. Dans toutes les communes, les habitants sont confrontés à des violences que seule une fausse pudeur bienpensante qualifie encore de simples incivilités. Les maires eux, une fois de plus, doivent gérer les attentes légitimes de leurs concitoyens avec les outils dont ils disposent, ceux attribués par le législateur.
Ce n’est que le énième opus de cette pièce tragique qui se joue depuis plus de 30 ans et qui voit l’Etat se retirer progressivement de l’espace public. Crise des services publics, crise de l’hôpital public, crise des transports et désormais crise de l’autorité même de l’Etat.
« Comment agir ? Depuis le 11 mai, date du déconfinement, pas un jour sans que l’actualité ne vienne nous rappeler, avec son cortège de faits divers, parfois meurtriers, des criminels de plus en plus jeunes et violents qui contestent l’autorité de l’Etat. Ce dernier, toujours dépositaire, selon la formule lapidaire de Max Weber, du « monopole légitime de la violence » peine à rétablir une situation qui devient aussi explosive socialement que politiquement avec la montée des populismes.
Le premier Ministre, à Nice, a esquissé ce qui pourrait être, selon lui, la solution. L’Etat déléguerait, après une phase expérimentale, aux maires, un certain nombre de pouvoirs en matière de sécurité. Bien entendu, aussitôt prononcé son discours, des mains se lèvent pour être le premier maire à exprimer son soutien à cette proposition. Pas évident que ces maires comprennent la portée exacte de cet abandon déguisé de compétences par l’Etat, une véritable Délégation de Service Régalien !
Qui peut croire un seul instant que les maires, parce que proches du terrain, seront plus efficaces dans la mise en œuvre de pouvoirs dévolus par l’Etat et qu’il s’est révélé incapable de les assurer ? Le nouveau concept à la mode est « le couple maire-préfet », il pourrait n’être, en définitive, qu’un leurre intellectuel et institutionnel mis au point dans les officines de la communication de l’exécutif.
Le naufrage de l’Etat et de ses missions régaliennes pourrait se transformer en Titanic
Le naufrage de l’Etat et de ses missions régaliennes pourrait se transformer en Titanic pour des collectivités locales prises en tenaille entre les attentes des citoyens et les impératifs d’une gestion rigoureuse des finances publiques.
En entamant la déconstruction des pouvoirs régaliens en matière de sécurité, l’Etat renonce, de fait, à en assurer l’application homogène sur l’ensemble du territoire. La sécurité, bien public s’il en est, sera donc assurée aussi en fonction des capacités budgétaires des communes et de leur richesse. Verrons-nous les communes les plus aisées faire appel à des sociétés privées pour garantir la sécurité ? La sécurité en fonction de la fortune, et demain ? La justice aussi peut-être…
Une telle évolution ne fera que renforcer les inégalités sociales car, c’est une évidence, les communes les plus populaires ne pourront faire face à cette privatisation rampante de la sécurité et nos concitoyens les plus modestes seront mécaniquement les plus exposés.
Cette mission régalienne de l’Etat n’a pas cessé de reculer avec la catastrophique réduction des effectifs de police et gendarmerie voulue, en son temps, par Nicolas Sarkozy. Finalement, la nomination de Jean Castex pourrait être bien plus logique qu’on ne pense… », a expliqué le maire de Saint-Etienne.
On peut même penser que le Monde d’après n’est, en fait, qu’une machine à remonter le temps !
Alors que faire ? Nous devons créer un vrai continuum de sécurité, voulu par le gouvernement, accepté par les maires mais qui sera plus complexe que ce qu’annonce l’exécutif, permettant aux maires, de coordonner tous les aspects relatifs à la sécurité et à la tranquillité.
Lisez l’intégralité de la tribune de Gaël Perdriau ICI